Candice Maddy en conversation avec / with Steve Giasson
I had been meaning to get in touch with Steve Giasson since his show at Skol, so this has been a while coming. As fate Montreal would have it, I made his acquaintance not long after, and had him promise to answer all my questions. It wasn’t difficult. Steve is an absolute gentleman, who happens to have his hands in a lot of interesting projects.
Materiality: How do you feel that the relative permanence or impermanence of your work informs it? Do you feel like the less tangible or permanent works allow you to take larger risks? Do you have nostalgic feelings towards print?
Chaque travail pose ses propres questions, mais la matérialité en fait toujours partie. Prends LOVE FROM NEW YORK que j’ai présenté à Skol, lors de mon exposition à propos du 11 septembre. Il s’agissait d’un readymade ; une appropriation d’un parfum de DKNY du même nom. Le parfum était projeté dans l’espace de la galerie, chaque jour, par l’une des personnes qui travaillent au centre. Il n’y avait rien à voir. Seul l’odorat des visiteurs était vaguement interpellé. Aussi, un texte indiquait aux visiteurs la « présence » de l’œuvre. S’ils ne le lisaient pas, ils pouvaient penser qu’une visiteuse ayant mis un peu trop de parfum venait de passer par-là… Cette œuvre s’évaporait très vite et, à mon sens, elle était aussi invisible que l’amour ou le capitalisme qui nous entoure. Et, peut-être, aussi éphémère, qui sait ?
En regardant le travail de certains artistes aujourd’hui, on pourrait avoir l’impression que l’art conceptuel est devenu un style. Et, paradoxalement, une autre façon de fabriquer des objets… Or, l’œuvre, c’est d’abord le concept. Mais il arrive que ce concept s’ancre dans la matière, dans un objet, un livre ou un casse-tête, par exemple. En outre, certaines propositions présentent plus de risques que d’autres ; celles qui sont folles ou tellement minimales qu’elles peuvent passer inaperçues. Pourtant, si elles me semblent pleinement justifiées par l’idée de base et intégrées dans l’ensemble, je n’ai pas de problème à les présenter. Celle-ci est, de toute façon, longuement mûrie avant que je ne réalise ou ne fasse réaliser industriellement ses supports matériels.
Pour répondre à ta question, j’aime passionnément les livres, leurs épaisseurs, leurs couleurs, leur texture, leur volume… Je les collectionne même. Ils sont, pour moi, un moyen privilégié pour présenter mon travail et mes idées. Je reviens toujours aux livres d’artistes ou de poésie qui m’entourent. Les livres sont mon véritable atelier.

Geography: Do you feel that working within a more conceptual practice alleviates the requirement for the author to have a personal geographic claim? For instance, as a non New Yorker, do you think your recent works at Centre Skol would have been inauthentic in a more lyric tradition? Do you feel a desire to write “local” often, or what are the places that inspire you to write, these days?
Je pense, en effet, que le contexte de réalisation de l’œuvre doit toujours être pris en compte. Et ce contexte inclut évidemment un positionnement géographique. Par exemple, il n’y a qu’à lire la plupart des poèmes conceptuels, pour constater à quel point ils sont (nord)-américains. Le rapport qu’ils entretiennent avec les produits de consommation, la publicité, les journaux, l’Internet, l’Histoire de l’art, tout cela est profondément occidental, et, par extension, américain…
Ne pas être un New Yorkais a, bien sûr, influencé la façon dont j’ai conçu l’exposition « 11 » chez Skol, puisque je n’ai pas tant abordé l’événement lui-même, que ses manifestations médiatisées. (Comme des millions d’autres personnes, c’est ainsi que j’ai été témoin de ce qui s’est passé). De fait, ce qui m’intéressait, en tant qu’artiste conceptuel, dans les attentats du 11 septembre 2001, c’est notamment l’impact que les images de cette catastrophe – immédiatement mises en boucles – ont eu sur notre rapport aux images en général et comment elles nous hantent encore et génèrent d’autres fantômes…
En ce sens, je pense que ma distance géographique m’a sans doute été utile, puisqu’elle m’a aidé à éviter un trop grand pathos. À mon avis, cette exposition ne devait pas seulement être le lieu d’une commémoration, mais aussi celui d’une réflexion. L’une des pièces de Robert Barry que je préfère est celle où il désigne la galerie comme un endroit pour penser : SOME PLACES TO WHICH WE CAN COME, AND FOR A WHILE, « BE FREE TO THINK ABOUT WHAT WE ARE GOING TO DO. » (MARCUSE)
Plusieurs de mes œuvres ont d’ailleurs pour sujet ma position géographique. DIRECTIONS, que j’ai co-écrit avec Robert Fitterman, présente ainsi la plupart des trajets (en bicyclette, en jet, à pieds, etc.) entre son appartement à New York et le mien, à Montréal. Cette œuvre peut ainsi se lire comme le lieu d’une rencontre entre deux artistes/humains/citadins nord-américains, mais aussi comme un regard porté sur tous les moyens de transport qui sont maintenant à notre disposition et qui ont irrémédiablement changé notre façon de vivre.
De même, je réalise en ce moment un projet dans lequel je note les latitudes et les longitudes de tous les endroits où je me rends dans la journée. Ce projet, commencé le 1er novembre 2012, s’inscrit dans une série de textes, intitulé CLOCK WISE produits par plusieurs auteurs à travers le monde et publié quotidiennement sur le blog http://clockwisewise.wordpress.com/. Tous les textes portent sur un changement observé dans la journée.
À travers tout cela, je recherche, une certaine poésie du déplacement, mais c’est aussi un moyen d’explorer une approche qui soit à la fois conceptuelle et subjective.
Parallèlement, je mène avec eux une réflexion sur les changements que les GPS ou Internet ont apportés sur notre façon de se déplacer ou de voyager. Afterall, now we all live on Google Earth.

Language: How do you choose which language is appropriate to the work at hand, whether English, French, or symbols? When? Why? What are the factors that inform these decisions?
Tout dépend du concept. Par exemple, si le sujet auquel je m’intéresse est américain et si les textes prélevés sur Internet sont en anglais, il n’y a aucune raison que le livre soit en français, à moins que je ne veuille parler de ce geste de la traduction.
Des dizaines de petites décisions doivent couramment être prises dans ce processus de sélection et d’appropriation : quelle police, quelle est l’histoire de cette police, quel format pour le livre, combien de page doit-il avoir, que doit-il y avoir sur la couverture et surtout, dois-je absolument publier ce livre, etc. Le choix de la langue n’est que l’un d’eux.
Récemment, j’ai publié dans Matrix Magazine, un travail assez radical intitulé FOUR QUIET POEMS. Ces poèmes sont une tentative de dialogue avec les peintures d’Agnes Martin et One Million Dots de Robert Barry. J’ai essayé toutes sortes de choses et finalement, je suis arrivé à ces poèmes de points, très minimaux et comme en marge de la production littéraire ; tranquilles et seuls. Je n’aurais jamais cru que quelqu’un puisse s’y intéresser.

Concept: Do you choose a conceptual approach to treat a specific theme you are interested in, or does the theme get selected afterwards to best suit a conceptual approach that excites you? Is it the approach or the topic which you find more stimulating?
Tous mes travaux sont de nature « conceptuelle ». Parfois, c’est le sujet qui s’impose à moi avec une évidence brûlante. Dans ces cas-là, je dois être sur mes gardes : il risque d’être trop subjectif, trop facile ou rabâché. Parfois, comme je le disais plus haut, c’est la forme qui m’inspire le concept. (J’ai par exemple, réalisé une série de poèmes basée sur des textes de Samuel Beckett, parce que je souhaitais poser la question du « monochrome » en poésie…) Mais le plus souvent, c’est un désir de dialogue avec les œuvres d’autres artistes ou d’autres écrivains qui me pousse à créer une nouvelle oeuvre. J’aime passionnément l’histoire de l’art. Récemment, je suis tombé sur une phrase de Robert Morris qui résume assez bien tout cela : « Depuis quelques temps le problème est un problème d’idées – ceux qu’on admire le plus sont ceux qui ont les idées les meilleures, les plus incisives (Cage et Duchamp, par exemple)… L’art d’aujourd’hui me semble être une forme d’histoire de l’art ».
Mais de nouveau, je dois faire attention à ne pas jouer les mandarins.
Death: Many of your works seem motivated by or interested in death. What are the elements of death (esp. historical and non-sensational death) that interest you?
J’aurais envie de répondre comme Warhol : « …I realized that everything I was doing must have been Death. » La mort m’obsède, mais je ne peux pas dire qu’elle « m’intéresse ». J’aime cette histoire de Freud qui raconte qu’il y a longtemps, un roi britannique, atterré par la mort de sa femme, la fit transportée dans tout le royaume. Chaque fois que le cercueil fut déposé au sol, on éleva un monument à cet endroit. Certains de ces monuments existent encore aujourd’hui. Imaginons, poursuit Freud, une femme allant pleurer chaque jour devant l’un d’eux. Cette femme serait une névrosée.
Je me trompe peut-être, mais il me semble que ça a quelque chose à voir avec l’art. Beaucoup d’œuvres sont des monuments qui se cachent.
Audience: How do you find your impressions and relationship with your work is changed or affected by its public performance and reception? Do you find your conception of your work alters?
Le fait de publier mes livres ou de montrer publiquement mon travail l’a transformé en profondeur et pour le mieux, il me semble. C’est une chance incroyable de pouvoir partager son travail, sa pensée, comme ici, avec toi. J’ai horreur de la facilité. Quand je travaille, je suis mon propre flic. Non pas parce que je m’autocensure, mais parce que je ne laisse rien passer, surtout si je sais que ce sera montrer en public ou publié. Je peux recommencer un livre 10 fois, 15 fois, avant d’être satisfait.
Future: What is next? What are you working on these days?
J’élabore présentement trois nouvelles expositions, dont une qui devrait être pratiquement invisible… Je planche aussi sur plusieurs livres à la fois, dont mon propre « Bestiaire ». Je n’arrête pratiquement jamais de travailler. Je ne sais pas ce que ça veut dire : « se reposer ».
What are you reading?
Prêts et renouvellements
1
Titre Rudolf Stingel / Stingel, Rudolf.
No de document 32002510704842
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 11/10/2012
Doit être remis le
01/11/2012
Retard
Renouveler ?
Frais à ce jour 1,80 $
2
Titre Sol LeWitt wall drawing 1176 : seven basic colors and all their combinations in a square within a square : for Josef Albers / LeWitt, Sol, 1928-2007
No de document 32002510704925
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 24/10/2012
Doit être remis le
14/11/2012
Renouveler
3
Titre Buren / Lelong, Guy, 1952-
No de document 32002516640198
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 24/10/2012
Doit être remis le
14/11/2012
Renouveler
4
Titre Sol LeWitt : a retrospective / LeWitt, Sol, 1928-2007
No de document 32002507115440
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 27/10/2012
Doit être remis le
17/11/2012
Renouveler
5
Titre In & out of Amsterdam : travels in conceptual art, 1960-1976
No de document 32002512831460
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 02/11/2012
Doit être remis le
23/11/2012
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6
Titre Une révolution symbolique : l’iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique / Christin, Olivier
No de document 32777007448546
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 08/11/2012
Doit être remis le
29/11/2012
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7
Titre Les protestants et la création artistique et littéraire : des réformateurs aux romantiques
No de document 32002511567958
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 08/11/2012
Doit être remis le
29/11/2012
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8
Titre L’iconoclasme byzantin : le dossier archéologique / Grabar, André, 1896-
No de document 32002515466983
Emprunté à Grande Bibliothèque
Emprunté le 08/11/2012
Doit être remis le
29/11/2012
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En plus de Uncreative Writing de Kenneth Goldsmith, L’art conceptuel, une perspective, Klaus Scherübel, Vol. 13 et Mort dans les nuages d’Agatha Christie.